-Tristan Baille : Donc beaucoup de liberté aussi.
-Xavier Simonin : Il fallait cependant que Jean Jacques Milteau garde une certaine cohérence dans le spectacle. Et ensuite on pouvait répéter dans un théâtre.
-Tristan Baille : J’ai beaucoup apprécié la musique dans ce spectacle. Old school. Des variations de blues. Un côté nostalgique. Mais… Est ce également un engagement personnel ? Car ça parle de migrations, de violences policières…
-Xavier Simonin : J’ai effectivement dans ma vie des engagements en Afrique. Mais là, je voulais parler de Steinbeck, du réchauffement climatique, avec la tempête de sable au début, ou le déluge de pluie, la crise économique…
-Tristan Baille : 1929.
-Xavier Simonin : Oui. L’essoufflement du monde capitaliste. Les migrants qui rappellent la société d’aujourd’hui. Mais ce qui sauve ces personnes, et c’est magnifique, c’est leur dignité. La famille. Ils cherchent à tenir, à rester debout. A croire. À rêver. D’ailleurs…qu’est ce qui nous fait tenir quand ça ne va pas ?
-Tristan Baille : Ce spectacle fait poser de bonnes questions.
-Xavier Simonin : Oui mais il ne donne pas de réponses. Il aide à s’interroger.
-Tristan Baille : Ce qui m’a bluffé, c’est votre jeu. L’aspect physique. Vous vous transformez sans cesse pour incarner plusieurs personnages.
-Xavier Simonin : Il y a une 40ne de personnages. En tant que metteur en scène, je travaille avec des animaux qui se déplacent comme des pions sur un plateau. Ils bougent et ça me permet de composer, un peu comme un enfant. Tout en respectant l’esprit de l’œuvre. En tant qu’acteur, il faut alors provoquer la surprise, le décalage, la sensibilité.
-Tristan Baille : Vous avez dit « un peu comme un enfant » et, justement, cela ressemblait vraiment à un conte.
-Xavier Simonin : Utiliser la forme du conte permet effectivement d’entendre la langue de Steinbeck. Cela fonctionne car les spectateurs se font des images. J’offre un tremplin mais ils jouent aussi un rôle, une action, ils créent aussi d’une certaine manière.
-Tristan Baille : Est ce que la principale difficulté n’était pas que les musiciens deviennent des personnages ? Les témoins d’une situation précise ?
-Xavier Simonin : C’était le pari. Ils jouent partout. Ils sont connus dans leur domaine. Mais peu à peu, et ils ont beaucoup travaillé, malgré la contrebasse et le reste, ils participent à des tableaux vivants, grâce à leur habileté. Ils jouent dans les silences. Ils adoptent des positions. Des attitudes. Ils racontent aussi quelque chose. Ils sont habités par un rôle supplémentaire.
-Tristan Baille : C’est un très bel hommage à Steinbeck, je trouve, prix Pulitzer et prix Nobel de littérature. Est ce qu’il y a un projet en cours ?
-Xavier Simonin : Peut être un polar musical sur l’Amérique d’aujourd’hui. On verra.
-Tristan Baille : Bravo pour cette collaboration et cette pièce. C’était un plaisir de vous rencontrer pour Crush magazine !
-Xavier Simonin : Merci à vous !